Contrôler sa vie?

La semaine dernière j'ai fait un séminaire d'intégration.
Une des activités consistait à se positionner sur une échelle de 0 à 10 par rapport à notre accord à cette phrase: "Je contrôle ma vie, mon corps, mes pensées, mes émotions, mes comportements, mes réactions, mes maladies". 0 était désaccord total, 10 accord total.
J'ai été surprise par le fait qu'une dizaine de personnes se positionnaient sur 8 ou 9.
Ces gens étaient surtout des gens qui avaient confiance en eux. Très majoritairement des anglo-saxons (en bonne sciences-po j'ai pensé protestantisme, Max Weber etc.)
Quel est le contrôle que vous pensez avoir sur votre vie? Est-ce que vous pensez qu'en travaillant on peut arriver à augmenter ce contrôle?

J'avoue que je suis mitigée là dessus. Autant j'ai l'impression d'avoir "prise" sur ma vie, mes émotions, mon corps, mon comportament (après 9h00 du matin pour cette dernière partie), autant non je n'ai pas envie de contrôler tout. J'ai une grosse tendance control freak et j'essaie au contraire de lâcher prise car je me rends très malheureuse avec cette tendance là.

C'est un peu nébuleux tout ca pour moi.
Je ne vois pas en quoi vouloir tout contrôler serait bien? Je suis trop dans le contrôle,justement,et justement,je ne trouve pas que cela m'aide à avancer,lâcher- prise,laisser la porte ouverte aux belle choses de la vie. Pour moi,il fait justement accepter l'idee qu'on ne peut pas tout contrôler.
Pour prendre l'exmple du contrôle des émotions, s'il l'on contrôle trop,on peut finir par tout refouler,et ce n'est jamais bo,,car si c'est pour finir par somatiser parce qu'on n'a pa voulu ressentir,bof quoi.

Je ne vois pas non plus le rapport entre le contrôle et la confiance en soi. Je veux tout contrôler et ce n'est pas pour autant que j'ai confiance en moi,bien au contraire.
Ça me rappelle un peu le livre " fais toi confiance" que j'ai lu il y a peu. Il traînait depuis des années dans ma bibliothèque,je n'étais pas prête pour le lire. L'auteure y parle des anglo saxons il me semble.effectivement,on ne semble pas voir les choses de la même façon.
Mais ce n'est pas pour autant que parce qu'on a l'air d'avoir confiance en soi qu'on l'est pour autant. À mon avis,justement quand tu contrôles trop,tu passes pour avoir l'air d'avoir confiance en toi,mais est ce réellement le cas? Je me suis toujours posé la question.

En fait le discours des gens qui se donnaient une note élevée était de dire: "J'ai décidé de choisir où va ma vie, d'en faire ce que je veux et même si c'est partiellement une illusion, il est important de penser que notre volonté dirige notre vie pour pouvoir parvenir à ses objectifs et correspondre à ce qu'on aime/veut/pense"

Ça ne me parle toujours pas alors lol

Oui,tout faire pour atteindre ses objectifs,c'est normal. Mais d'un autre côté,il faut savoir laisser la porte ouverte à d'autre choses. Et si ce que l'on voulait vraiment n'était qu'une illusion et n'etait finalement pas ce qui nous correspond vraiment? Je pense qu'il ne faut pas l'oublier. Être trop à fond, ne serait pas comme avoir des œillères?
Et de toute façon,le vie se charge toujours d'une façon ou d'une autre de t'en informer si ton choix n'était pas le bon.
Je crois qu'il est bon d'accepter le fait que non,on ne peut pas tout contrôler.se donner les moyens de réussir,bosser,oui, mais se croire tout puissant,je ne suis pas d'accord. En réalité,on ne contrôle rien,même,je dirais.on croit juste qu'on le fait.

Je crois que j'aurais été larguée à ton stage,je ne pige pas.

Il m'est arrivé de prendre des bêtabloquants pour des examens importants (permis et certains orauxà et pour moi c'était incroyable, parce-ce que j'avais à la fois l'impression d'être totalement relaxée et de tout bien contrôler, tout était facile, j'arrivais à faire ce que je voulais, à me mettre en avant, les interactions se passaient bien, je contrôlais l'image que je renvoyais et je ne me sentais pas du tout stressé, tout était naturel.
Mais dans mon état normal plus j'essaie de contrôler quelque chose, plus je mets une pression, plus c'est susceptible de dégénérer. C'est pour ça que quand je suis soûle face à une personne avec qui je me sens mal à l'aise, je fais n'importe quoi, tout ce que j'ai essayé de contrôler ressort de manière anarchique et c'est le grand n'importe quoi (verre sur la chemise, invitation indigne )

Melo: par exemple un mec disait qu'il avait réalisé vers 20/25ans qu'il était trop egocentrique, obsédé par l'argent etc. mais qu'il avait réussi à changer, à orienter sa carrière vers quelque chose de mieux, à changer lui même etc. et que du coup il considérait avoir le contrôle sur sa vie.
Moi ça m'impressionne, j'ai tellement l'impression que ma vie est l'anarchie totale.

J'ai pris des beta bloquants plusieurs mois,qu'elle horreur!
Comme quoi one est tous différents.

Concernant ce gars,je dirais: waouh,,il a ouvert les yeux et vit enfin en accord avec lui même!
Est ce pour autant du contrôle?

Je suis ultra presse,je file,desolee pour la reponse express,je lirai les réponses avec grand intérêt.

Camille.C a écrit:

"J'ai décidé de choisir où va ma vie, d'en faire ce que je veux et même si c'est partiellement une illusion, il est important de penser que notre volonté dirige notre vie pour pouvoir parvenir à ses objectifs et correspondre à ce qu'on aime/veut/pense"

La touououououte petite bourdieusienne que je suis se marre bien en lisant cette phrase. Ou je me mets à voir rouge, c'est selon.

Avoir l'illusion de sortir d'une domination pour mieux y rentrer tête baisser, voilà généralement ce à quoi mène ce genre de tentative de subjectivation de la contrainte sociale, à mon humble avis.

Et accessoirement, le revers de la médaille de ce courant de pensée me débecte totalement : c'est l'idée que ceux qui sont des loosers, des ratés, l'ont finalement bien cherché car ils n'ont pas su "saisir" leur vie.

On peut être faible, une beauté peut naître de la faiblesse et l'injonction à "être soi" là où il n'y a souvent que de la reproduction sociale est à mon avis l'arnaque intellectuelle du siècle.

Oui, je me suis dit: "Je suis vraiment à HEC et plus à Sciences Po!" on est à fond dans l'homo oeconomicus.

Eh ben vas (re)lire "Les structures sociales de l'économie" de Bourdieu et fonce z'y dans le tas !

Je l'ai refeuilleté ce week end et franchement, je kiffe à chaque fois autant.

C'est en effet ce qui est clairement sous-entendu par la pensée de ces individus. Et comme toi, Camille, je pense directement à la vulgate habituelle du protestantisme revisité à l'anglo-saxonne (j''aurais dû faire Sciences Po).

C'est d'ailleurs une question très intéressante: quelle est la part de notre liberté dans nos choix et dans notre conscience? Sans parler de Pierre Bourdieu, j'avais lu il y a quelque temps les propos d'un philosophe (américain d'ailleurs), John Searle, qui essayait de délimiter philosophiquement, en s'appuyant sur les travaux scientifiques, la part de notre liberté dans nos choix de pensée. Et ce n'était pas brillant pour notre fameuse liberté de pensée.
Cela dit, la cartésienne que je suis, est très attachée au moi tout puissant (ce qui me fait dire qu'il y a plusieurs origines intellectuelles à cette idée d'un contrôle de sa vie, puisque la philosophie de Descartes aboutit au même résultat).

Cyrius: Jamais lu. Je suis une mauvaise IEpienne mea culpa!
Mais je leur ai cité Shakespeare: "Life is a tale full of sound and fury told by an idiot and signifying nothing" et je leur ai parlé de L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme.

Je vais googler John Searle.

Reconnaître qu'on a des sujétions et que l'on est pas "libre" comme le prétend la vulgate évoquée par Camille ne veut pas dire que l'on a aucun choix à faire !

Mais elle en reconnaît mieux le contour des possibles, et dès lors rend cette "liberté" plus effective ...

... à mon humble avis ......

Ca ne me déprime pas du tout de me dire que je suis conditionnée par mon milieu et de pointer les choix de ma vie que j'ai "subis" (mais tout en ayant l'impression de choisir quand même) et ceux pour lesquels, infiniment plus rares mais d'autant plus forts et significatifs, pour lesquels c'était moi et moi même qui décidions.

C'était ZE grand sujet dans les débats avec CherEx à l'époque où on se prenait pour Sartre et Beauvoir. Lui la perspective de ne pas pouvoir tout choisir le déprimait profondément et le faisait renoncer à la vie .... Moi je me disais que la vie c'était quand même chouette et qu'on pouvait bien vivre quand même, surtout si on avait la clairvoyance de ses choix et non-choix.

En fait, je ne m'intéresse pas qu'au conditionnement social, mais au conditionnement par la construction physique de notre esprit (thèse de John Searle qui définit les limites de notre conscience par les contraintes physiques dégagées par la neurobiologie).
A l'extrême opposé, tu as le moi de Descartes qui est tout puissant pour comprendre et remanier le monde, comme on le voit tout au long des Méditations métaphysiques.

(en fait, je me place uniquement sur le terrain philosophique, pas sociologique comme Bourdieu).

Eh eh .. Chacun sa ptite perversion Nina

Je suis universitaire, pas IEPienne

Niveau philo je reste sur tonton Sartre, mémé Momone et j'actualise (à peine) avec tata Judith Butler en fait. Ce qui est un peu poltron comme attitude ...